
A l’occasion de sa 41e sortie dans l’univers périurbain d’Ile-de-France, Le Voyage Métropolitain proposait cette fois un nouvelle marche exploratoire de 19 km, entre les gares de Trappes et Jouy-en-Josas, en passant par SQY, autrement dit Saint-Quentin-en-Yvelines.
SQY abréviation marketing en vogue ou relooking verbal dû à la nouvelle génération, dont la résonance anglo-saxonne symbolise la mutation d’une ville nouvelle née dans les années 1970, lors du projet d’urbanisation visant à absorber la croissance démographique vertigineuse de Paris. Au total cinq villes nouvelles allaient ainsi naître : Evry (1967), Cergy-Pontoise (1969), SQY (1970), Marne-La-Vallée (1972) et Sénart (ex-Melun en 1973).
Avec des décennies de recul, le « grand ménage » imaginé par De Gaulle semble s’essouffler. Le bilan 2013 dénombre 850.000 habitants pour ces cinq villes qui absorbaient 50% de l’ accroissement démographique francilien contre 1/6 aujourd’hui.
Nous sommes près de 80 marcheurs à descendre à la gare de Trappes. La majorité est parisienne intra-muros, architectes, paysagistes, étudiants, urbanistes, quelques journalistes et autres randonneurs en quête de découverte exotique. Nous marchons en une longue file avant de faire une première pause sur un site désormais classé aux Monuments historiques : Les Dents de Scie, créé en 1931 par les architectes Henri et André Gutton. Cette composition de 40 pavillons disposés à 45° avait pour but d’offrir un « chez soi » aux locataires tout en favorisant la convivialité et la lumière, un exemple de ce qui deviendra un spécimen atypique du « logement social ».
En 1972 Trappes faisait partie des 11 communes qui allaient définir le périmètre de la future SQY. En près d’un demi-siècle, l’urbanisation a fini par gommer les limites de chacune. Le groupe va ainsi progresser entre les cités et les lotissements ou s’entremêlent les HLM de quelques étages et des maisons individuelles. Ce programme des villes nouvelles comprenait déjà à l’époque la création des voies de communication notamment les RER (Réseau Express Régional) et autres autoroutes de banlieue. Nous longeons ainsi la RN 10 sur deux kilomètres. Un stade de foot en friche, des entrepôts de matériel ferroviaires, des châteaux d’eau déjà anciens… ces vestiges nous replongent à l’époque de ces débuts, grande période d’effervescence industrielle lorsque la SNCF créa son réseau et ses gares et qu’il fallait loger de nombreux travailleurs. La plupart des zones pavillonnaires de la région ont ainsi été bâties lors de la construction des gares parisiennes. Nous arrivons au cœur de la ville nouvelle par le centre commercial SQY Ouest. L’architecture moderne côtoie ici le néo-moderne, comme le théâtre situé sur la place Georges-Pompidou. L’emplacement du bâtiment ainsi que son programme furent définis au début des années 1980.

Le choix de l’équipe d’architecte s’est fait par l’organisation d’un concours en 1985 remporté par Stanislas Fiszer, architecte, et Michel Rioualec, scénographe.
L’inauguration eut lieu début 1993. Le Théâtre frappe d’abord par son aspect monumental et son architecture originale : mariage heureux de béton brut, de pierre, de métal et de verre. La rotonde caractérise l’esprit général de l’architecte Stanislas Fiszer, désireux d’allier modernité et classicisme.
Au fil du temps SQY va devenir un pôle majeur de la région parisienne. On y trouve aujourd’hui la base de loisir avec sa réserve naturelle, un Golf national, un vélodrome olympique. Crée en 1991, l’UVSQ (Unité de Versailles-St Quentin) accueille désormais plus de 19 000 étudiants, une nébuleuse de 11 centres dont le pôle scientifique et technologique de Paris-Saclay.
Nous quittons le centre ville pour rejoindre le parc où nous nous installons pour pique-niquer au soleil. Une heure plus tard, les marcheurs reprennent la route vers Guyancourt pour aller admirer la curiosité locale : les Caryatides. Construits en 1992 par l’architecte espagnol Manolo Nuñez-Yanowsky, disciple de Ricardo Bofill, deux immeubles d’habitation font référence à l’Antiquité. Des reproductions gigantesques de la Vénus de Milo semblent soutenir ces bâtiments sur leurs épaules. Symétriques et identiques, séparés par un petit parc, ces bâtiments ont la particularité d’être l’un en accession à la propriété et l’autre en locatif aidé. Sans qu’on sache lequel ! L’idée originelle était de montrer qu’on pouvait faire du logement social de qualité.
Cette randonnée périurbaine va se poursuivre en forêt en rejoignant la Bièvre, une petite rivière désormais recouverte en partie qui va se jeter dans la Seine, quelque part dans Paris. Il nous faut rejoindre la gare de Jouy-en-Josas et les kilomètres accumulés en ville commencent à se faire sentir. La file s’est considérablement distendue, forçant les organisateurs à faire plusieurs pauses pour rassembler tout le monde. Jens, l’un des responsables du Voyage Métropolitain, souhaitant faire un débriefing collectif et recueillir les impressions de chacun, va tenter de persuader le bar-restaurant de la gare d’accueillir, disons… 40 à 50 clients d’un coup. Le soleil déclinait et j’abandonnais le groupe pour rejoindre Paris. A l’heure où je publie cet article, j‘ignore s’il a réussi un tel exploit ! Le prochain rendez-vous est fixé au 13 avril pour une marche entre Mennecy et Corbeil-Essonnes, un voyage périurbain qui affiche déjà complet.
Télécharger la trace de cette randonnée périurbaine :