Il suffit parfois de peu de chose, peut être une minute d’inattention, pour que la journée d’un groupe de randonneurs parisiens soit perturbée. Le cas s’est produit par ce matin glacé de février lorsque le soleil peinait à réchauffer les corps endormis dans un hall banlieue de la gare du Nord désertée des masses laborieuses. Les horaires SNCF défilaient sur l’écran bleu, les marcheurs s’étaient sagement regroupés et attendaient que Christian, notre guide spirituel du jour donne le signal de rejoindre le quai où stationnait le train en direction de Saint-Ouen l’Aumône afin d’y effectuer une correspondance.
Le terme « spirituel » prit soudain un autre sens , celui de « très drôle » lorsque tout le groupe se retrouva sur le quai désert de St Ouen l’Aumône-Liesse, la mauvaise gare ! Quant au terme Liesse, synonyme de joie et d’allégresse, il fut un peu terni en apprenant que le programme initial allait connaître quelques bouleversements. Une réunion de crise rassembla sur le quai même, les meilleurs spécialistes de la cartographie topologique afin d’élaborer d’urgence un plan B pour sauver une journée de rando raccourcie par le couvre-feu..et la dite erreur. Après une étude rapide du document, il fut ainsi décidé de rejoindre la gare de l’Isle-Adam par la plaine en suivant en partie le cours de l’Oise. Place aux grands espaces et à l’impro !!
Les immenses étendues agricoles du Vexin balayées par une brise glaciale sont toujours propices à la méditation, à l’introspection mais plus encore chez certains à l’interrogation : « qu’est ce qu’on fout ici par une température ressentie de -4° C au milieu de terres labourées et où le premier bosquet pour soulager sa vessie se trouve à deux kilomètres ??! » . Seul le randonneur endurci par des années d’errance hivernale en Ile-de-France peut y répondre et renoncer à un dimanche douillet chez lui.
Notre itinéraire de secours passa ainsi par Auvers-sur-Oise, Doit-on rappeler que cette charmante ville est le berceau de l’impressionnisme et plus encore le lieux de villégiature des frères Vincent Van Gogh ? Non c’est inutile car il faut être miro (ha ha , elle est très bonne , merci) pour ne pas constater que TOUTE l’activité touristique tourne ici autour du peintre à l’oreille coupée.

Difficile d’y échapper. Et c’est au coeur de ce temple du 3 eme art que la horde bruyante, crottée, aux oripeaux bariolés, d’une esthétique affligeante, répandit sans aucun complexe son pique-nique, aux pieds même de la statue du maître !
Si la pause-déjeuner du randonneur moyen n’a habituellement rien de reluisant, celle d’Auvers-sur-Oise fut particulièrement réussie. En quelques minutes, la vingtaine de marcheurs transforma le charmant petit square en un mini-campement d’où émanaient quelques effluves douteuses. Malgré une température frôlant le zéro, étrangement personne ne sembla s’en plaindre.
Après une seconde concertation des experts, il paraissait difficile de rejoindre la gare de Parmain-L’Isle Adam dans les délais impartis. Aussi , le guide « drôle » décida de mettre fin à notre balade à la gare de Valmondois après un parcours de 16 à 17 km. Morale : une faute d’inattention se traduit en randonnée par deux conséquences possibles : une rallonge du parcours de plusieurs kilomètres ou la chance de regarder la seconde mi-temps d’un match de rugby des Six Nations en rentrant plus tôt !
Richard Kirsch
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