Pèlerin addict-multi-récidiviste, je suis reparti avec Sabrina (dans le cadre de l’amitié franco-allemande!) vers Saint- Jacques de Compostelle depuis Lisbonne du 1er avril au 4 mai 2015. Une marche de 650 km sur les redoutables chemins pavés, les routes bitumées, les sentiers perdus dans les forêts d’eucalyptus.Nous avons affronté cette fois les terribles repas locaux, les terribles pieuvres aillées, le surpoids des kilos d’oranges offerts, les gymnases déserts des Bombeiros..etc…
Après une première sur le Camino de Francès l’an dernier (Kirschos goes to Compostelle Saison 1) , ce voyage du Portugal à l’Espagne fut totalement différent. Et voici pourquoi !
une boucle de 25 km suivant les méandres de la Marnee GR11 suit en grande partie le fameux Aqueduc de Dhui qui alimente Paris par simple gravité.
Les vendanges sont terminées depuis juin mais les vignes ont gardé leur feuillage ou perce encore un raisin tardif faible en sucre qui hélas ne deviendra jamais du vin ! La Marne serpente entre ces coteaux vallonnés tirés à quatre épingles couverts d’une brume tenace. C’est à la gare de Nanteuil-Saacy que stoppe notre train en provenance de la Gare de L’Est à Paris et débute notre randonnée. Nous avons rendez-vous avec Stéphane, notre guide du jour pour une boucle de 25 km. Cet itinéraire suit en grande partie le GR11. Ce sentier de Grande Randonnée a été ici tracé sur l’aqueduc de la Dhui. Cet ouvrage du Pays de Meaux constitue l’une des alimentations en eau de Paris. Les eaux, captées dans la région de Château-Thierry, sont acheminées par simple gravité jusqu’au réservoir de Ménilmontant. Le circuit comprend 114 kilomètres d’aqueduc et 17 kilomètres de siphon. L’aqueduc est enterré sur la totalité de son parcours et de tels regards permettent de contrôler l’eau et les canalisations. Nous suivrons donc cet aqueduc sous nos pieds durant près de 14 km avant de franchir la Marne à Nogent l’Artaud. Une aire de pique-nique attend promeneurs et randonneurs en contre-bas d’un joli pont métallique. Une fois sur l’autre rive de la Marne, changement de décor. Le sentier escalade le vignoble jusqu’à son sommet. Nous revenons vers l’Ouest en suivant les chemins tracés entre les vignes. Du haut de ces collines, le randonneur jouit d’un panorama superbe sur toute cette vallée verdoyante ou se nichent de petits villages bordés de forêt. Le train s’y faufile comme un jouet miniature. Quelques rares rayons de soleil nous donnent un échantillon de la beauté de cette région viticole les jours d’été. Cette première moitié du parcours fut marquée par des passages un peu pentus et rendus très glissant par les dernières averses. En cette saison, les sentiers regorgent de petits trésors. Les connaisseurs ramasseront des champignons, les promeneurs ont oublié encore de nombreuses châtaignes et parfois des noix . Les pommiers nous tendent les bras. Quoi de plus délicieux que de faire sa cueillette de Royale Gala juteuses. Le retour par les vignobles est l’occasion de faire une halte-dégustation organisée par Stéphane . Le groupe fera donc une pause à Charly-sur-Marne chez le négociant-récolteur Jean Pierre Léguillette. Celui-ci nous expliquera avec passion son métier et les particularités des cépages de la région, notamment le fameux Pinot meunier. Cette dernière partie affiche environ les mêmes dénivelés, on retraverse ensuite la Marne pour reprendre le train ) Nanteuil-Saâcy. La fréquence des trains n’est pas fameuse, mieux vaut calculer si possible son heure de retour ou poireauter sur le quai , vu qu’il n’y a pas de bistrot à proximité.
Un peu de culture œnologique ?
Pinot meunier (cépage noir) : il est appelé meunier tout simplement et pinot meunier en Champagne, son véritable fief au point d’y occuper le tiers du vignoble soit près de 11 000 ha. Il est ainsi le deuxième cépage le plus planté derrière le pinot noir (38 %) et devant le chardonnay (28 %). Dans le seul département de la Marne, il couvre à lui seul 8410 ha soit 37 % des surfaces. A Charly-sur-Marne par exemple, il occupe 80% des 320 ha faisant de cette commune la capitale champenoise du pinot meunier. On pourrait croire que cette position presque dominante lui vaudrait une reconnaissance à la hauteur de ce qu’il apporte au Champagne. A voir ses minuscules grappes, compactes et à très petits grains à la peau épaisse et noire mais à chair incolore, nulle doute ! Il appartient bien (par mutation) à la famille des pinots dont l’instabilité est proverbiale. Il se distingue d’ailleurs du pinot noir par une villosité plus marquée et par ce fin duvet blanchâtre sur la face inférieure des jeunes feuilles (cotonneuses), à l’apparence de farine qui lui vaut son surnom de meunier (même nom évocateur en allemand avec müller).
Cette carte d’époque montre les divers éléments fortifiés qui marquèrent la séparation de Berlin en 1961. En marchant le long de ce mur, on se demande quelle logique ou stratégie ont suivi les bâtisseurs !
Le 9 novembre 2014, la ville de Berlin commémora le 25e anniversaire de la chute du mur (1989). La réunification des deux Allemagne sera proclamée en septembre 1990. Ce symbole de la Guerre Froide fut érigé dans la nuit du 13 aout 1961 par la RDA lorsque des dizaines de milliers habitants du pays rejoignaient de plus en plus nombreux l’Allemagne de l’Ouest. Ce jour-là Berlin fut coupé en deux provoquant de tragiques séparations .
Après la démolition du Mur, les autorités ne laissèrent que deux rangées de pavés pour marquer son emplacement. Aujourd’hui sa trace se perd sous le bitume des nouvelles constructions ou la végétation.
En peu de temps, lespremiers fils barbelés seront remplacés par des ouvrages en ciment bordant un no man’s land , un double mur ou patrouillaient les vopo avec leur chien et ou étaient disposés des systèmes de tirs automatiques. Durant ces 25 ans , de nombreux berlinois de l’Est tentèrent par tous les moyens de le franchir , près de 200 y laissèrent leur vie. Un quart de siècle plus tard que reste-t-il de cet ouvrage ? Pour le découvrir, j’ai parcouru en compagnie de d’une amie berlinoise plus de 60 km sur la trace de ce mur matérialisé aujourd’hui pas une double rangée de gros pavés. Sachant que Berlin-Ouest fut totalement ceint de mur dans les années suivantes et ne fut ravitaillé que par un incroyable pont aérien mis en place par les Alliés. Ayant décidé de réaliser cette rando étalée sur trois jours, du nord au sud, nous partons de la gare d’Hermsdorf, non loin de l’aéroport International de Tegel. Immédiatement, on se rend compte qu’il n’est pas facile de retrouver la trace ce mur sur cette partie du parcours ! Durant des décennies, les constructions, les parcs, les routes effacent progressivement l’histoire. Un peu perdu nous demandons à plusieurs reprises notre chemin à des habitants du quartiers. Ils ont une vague idée de son emplacement et nous conseillent de remonter vers le nord. Par chance , on tombe sur un papy en vélo qui sillonne le parc naturel . Avec gentillesse, il étale ses cartes et nous donne enfin une vision plus précise de cette trace.
Pour la nouvelle génération, le Mur de Berlin semble parfois un boulet historique à traîner. Ce vestige des années noires attirent bien sûr quantité de touristes. De quoi susciter encore plus d’exaspération ! La Traban symbolise toujours le côté rustique de l’ex-RDA . Elle fait désormais le bonheur des collectionneurs.
Les panneaux de balisage « Berliner Mauer » apparaissent enfin , ouf ! Nous marchons en pleine campagne dans l’ex-RDA, quelques panneaux montrent les vues aériennes de la région, d’autres décrivent certains sites historiques comme une ancien camp de travail ou de malheureux immigrés de l’Europe de l’Est s’épuisaient aux champs. Souvent j’essayais d’imaginer ce paysage avec ce mur sordide en plein hiver, ces gardes frontières tirant à vue et ces quelques fous qui tentent de fuir par la rivière gelée en pleine nuit. Et cette vision me glaça le sang. Il nous faut ainsi parcourir plus de 15 km pour toucher les quartiers habités de Berlin. Cette ville étonnante fut en fait constituée d’une agglomération d’anciens petits bourgs, une capitale vaste désormais comme 5 fois Paris ! Autre constatation, ce mur fut tracé à la hâte entre les habitations et les rues sans vraiment de logique . Autrement dit, le randonneur est soumis à de nombreuses bifurcations et doit veiller à ne pas perdre de vue le balisage . Inutile d’ajouter que nous l’avons paumé et rechercher à plusieurs reprises, sur la carte , avec le GPS de l’Iphone, en interpelant des commerçants du coin. Force est de constater que la nouvelle génération de Berlinois ou les nouveaux immigrés turcs n’ont qu’une vague idée de l’emplacement du mur. Non loin de Pankow, nous arrivons par le Mauer Park, site fréquenté par les Berlinois lors du marché au puces hebdomadaire. Enfin, le mur se dresse à Gedenkstätte. Après la chute du mur, l’ouvrage a été revendu par morceaux à prix d’or, des tonnes de ciment aussi servi à la construction de routes . Comme si Berlin avait voulu effacer cette Nous sommes maintenant au coeur de Berlin, c’est à dire dans un sympathique enfer touristique où le mur occupe une place de choix. La trace nous plante devant le Reichtag dont le dôme de verre resplendit sous un pâle soleil. La police nous invite gentiment à contourner l’obstacle imposant pour des raisons de sécurité. De l’autre côté de l’édifice, nous prenons la direction de la porte de Brandebug qui est à Berlin ce qu’est l’Arc de Triomphe à Paris. Les Champs Elysées s’appellent ici Unter Den Linden, une avenue tout aussi bondée. Rappelons que cet édifice emblématique se retrouvait à l’Est lors de la construction du mur. En longeant le Tiegarden, le parc central de la ville, nous sommes de nouveau face au passé tragique de l’Allemagne. Non loin du mémorial de l’Holocauste, un autre mémorial rend hommage aux déportés homosexuels des camps nazis. La double rangée de pavés disparaitra souvent sous nos yeux , engloutie ici par un restaurant , un pont , un espace vert . Les Berlinois y a garent dessus leur voiture désormais sans même y songer alors que les touristes immortalisent leur visite par d’innombrables photos ou selfies. Arrivés à la Pozdamer Platz, le mur occupe un nouvel espace avec quelques blocs et une description historique succincte de sa contruction. Clic-clac et direction plein Est depuis le quartier de Mitte pour rejoindre un musée récent construit aux abords de vestige du mur : la Topographie de la Terreur. Nous nous trouvons ici dans le secteur qui fut le quartier général de la Gestapo. Des fouilles ont permis de dégager à ciel ouvert les géoles de la police nazi. Un long parcours rectiligne y retrace en images et textes l’anéantissement de la ville de Varsovie par Hitler. Ce site exceptionnel, dont l’entrée est gratuit fait cheminer le visiteur dans une chronologie terrifiante subliment illustrée et commentée de la montée du nazisme ainsi que du rôle qui jouait la Gestapo. On en sort un peu sonné avant de faire un détour plus léger par l’incontournable Check Point Charlie. Sur ce carrefour mythique sur la Friedrichstrasse, ancien point de contrôle C entre Berlin Ouest et Berlin Est contrôlé par les Américains, les boutiques de souvenirs s’agglutinent, jouxtant les musées dédiés au mur et à ses évasions spectaculaires , les bars couleur RDA , les restaurants option déco Traban ou uniformes russes , toute une industrie touristique érigée au souvenir, à l’exploitation du mur, bref du business 100% béton. Certains Berlinois affichent d’ailleurs un certain ras-le-bol de ces vagues touristiques perpétuelles pourtant si lucratives pour l’économie locale. Ce tracé du Mur de Berlin nous conduit au Mémorial du Mur sur la BernauerStrass , plus de 30 personnes y sont mortes.
De nombreux Berlinois de l’Est tentèrent durant 25 ans de franchir la double-rangée de béton et ce no man’s land piègé. 137 personnes payèrent de leur vie ces tentatives pour rejoindre l’Ouest . Un mémorial a été bâti en souvenir de leur courage et leur sacrifice pour la liberté.
Le Mur y est ici symbolisé par une longue haie de poteaux en acier coloré. Sur deux cents mètres, on y découvre certains vestiges du mur notamment les fosses qui servaient à bloquer d’éventuelles intrusion de véhicules . Un bâtiment surmonté d’une terrasse offre aux visiteurs une vue panoramique sur une des rues les plus représentatives de cette douloureuse construction, avec notamment des photos géantes imprimées sur les immeubles . C’est aussi l’occasion de découvrir de portraits de tous ceux qui ont laissé leur vie quelques part le long des 163 km du mur encerclant Berlin Ouest. De Mitte nous passons dans le quartier de Friedrichshain et Kreuzberg afin de rejoindre l’East Side Gallery. Le mur se déroule sur près d’un kilomètre le long de la rivière Spree, côté Berlin-Est. Plus de 100 artistes du monde entier y ont peint toutes sortes de messages, de tableaux ou de tags. On peut y voir bien sur le célèbre ‘baiser de l’amitié » entre Erich Honecker et Léonid Brejnev. Après avoir franchit le fameux pont Oberbaumbrüke, style néo-féodal aux allures de Lego, nous voilà reperdus ! La signalétique a disparu, rien ne figure au sol . Par chance je retrouve sur mon Iphone le pdf chargé sur http://www.berlin.de illustrant bien ce parcours urbain. En quittant le centre de Berlin, nous retrouvons peu à peu la campagne et très vite des espaces verdoyants plutôt désert. La copine fait les fonds de son sac, en sort quelques biscuits et une pomme . Il me reste quelques barres de céréales et un litre dans le Camel bag. Le parcours devient alors rectiligne , on se perd de nouveau en traversant une grande rivière , le mur est sensé la suivre . Devant nous , près de 2 kilomètres de lignes droite, une piste cyclable interminable. Pas un bistrot à l’horizon, pas un robinet. Et pour couronner le tout, l’autoroute en parallèle ! 18 km de marche , nous commençons à avoir réellement un gros creux et on se demande comment rentrer à la maison. Un peu crevé, on décide de quitter la trace du mur pour nous ravitailler dans un centre commercial situé miraculeusement à 500 m de là en franchissant l’autoroute. Après un déjeuner copieux à la cafétaria d’un magasin de bricolage, la berlinoise veut pousser le compteur. Sachant que l’on aimerait bien boucler plus tard la totalité du mur , soit près de 100 km . Il est près 17h00, le soleil décline et il est temps de rentrer. Un peu perdu, dans les quartiers de Treptow-Kopenick nous errons entre les bâtiments de l’usine géante Audi, un bus apparait au loin. Il nous mènera jusqu’à la gare du S-Bahn.
il faut environ trois jours de randonnée pour suivre cette portion du Mur de Berlin sur 60 km . Le tour complet mesure 160 km et il est relativement bien balisé. Toutefois, prévoyez carte et GPS , il se perd parfois sur un parking ou dans la végétation. Contournez les obstacles !
Ces trois jours de randonnée nous ont permis de découvrir des quartiers peu connus de Berlin,parfois intéressants, parfois insignifiants. Le Mur disparait peu à peu du paysage, peut être de la mémoire des Berlinois. Pourtant lors de ce 25e anniversaire de la chute du mur, la ville a mis le paquet. Du 7 au 9 novembre, autochtones et touristes participeront à cette fête. Plus de 8000 ballons éclairés et gonflés à l’hélium ont été disposés sur 15 km. Artistes, acteurs, écoliers, sportifs y accrocheront des messages de paix et de fraternité. Dans la nuit du 9 novembre; ils seront lâchés dans le ciel de la ville. Sur ce tracé, les organisateurs ont disposé un stand tous les 150 m. Chacun y raconte une histoire, celle d’un homme ou d’une femme qui a péri ou survécu en franchissant le mur, tout un symbole de liberté.