Devient-on addict aux chemins de Compostelle ? Sans doute pas , mais multi récidiviste certainement . « Pèlerin un jour pèlerin toujours » selon le dicton, un phénomène que l’on a du mal à cerner . En cherchant bien, je pourrais évoquer une aventure hors du commun. Les trekkeurs pourront alors me citer dix exemples de voyages inoubliables. Alors serait-ce l’aboutissement d’une quête spirituelle, mystique ou religieuse ? Le pèlerinage vers les reliques de St Jacques n’est pas l’unique voie pour soulager son âme et trouver la lumière . En vérité ces chemins vers Compostelle sont d’abord de longs périples durant lequels l’essentiel n’est pas d’atteindre le but mais comment on y parvient. Et puis c’est une formidable rupture avec le quotidien marquée par un dépouillement matériel et mental. Le pèlerin s’allège de son fardeau au fil des kilomètres pour ce concentrer sur lui-même. Marcher, se soigner, s’alimenter et profiter à 100% du paysage et des rencontres que lui offre le hasard du chemin. Depuis ma première expérience en 2014 sur le Camino de Francès, une force inexpliquée me pousse à repartir pour retrouver cette sensation la liberté, le plaisir de de l’itinérance, ce décor sans cesse renouvelé, ces petits matins solitaires et la joie spontanée de repartager une bière avec des amis perdus de vue , de cuisiner ensemble une tonne de pâtes, pester contre les ronfleurs des dortoirs puis se payer une nuit de pension réparatrice .
Résultat, je suis allé à et vers Compostelle par quatre chemins !
Chacun d’entre eux fut totalement différents . Vous trouverez en cliquant sur les liens ci dessous, le récit de ces pèlerinages réalisés à chaque fois en intégralité soit entre 680 et 950 km , soit de 30 à 36 jours de marche , des étapes de 20 à 30 km quotidiennes … sans le moindre jour de repos ! Ne croyez pas que c’est un exploit ou que ce fut sans douleur ou dénué de doutes . Début de tendinite, ampoules monstrueuses, périostite récurrente, mal de dos quasi chronique, piqures de punaises ou de moustique infectées, inflammation d’orteil due à d’anciennes gelures, chaussures bousillées et.. Et puis n’oubliez pas : No pain no Glory !! Périodes choisies : J’ai parcouru ces chemins toujours entre mi-avril et mi-juin
Pérégrination au long cours sur un itinéraire jacquaire millénaire ponctué de bastides et d’églises, des colosses plantés dans une nature généreuse ondulée à souhait. Retour sur 36 jours de marche d’Arles à Punte La Reina en Espagne .
Pèlerin multi récidiviste à la pause qui prend la pose.
Pèlerin un jour, pèlerin toujours dit-on. Sans doute car depuis 2014 en bon récidiviste je reviens sur les Chemins de Compostelle braver entre 700 à 1000 km d’un seul jet, m’assurer que la forme du senior est encore bonne. C’est aussi le moyen de rompre avec le quotidien durant un mois de vie nomade ultra light ou l’essentiel se résume à marcher, se soigner et se nourrir en écartant le superflu. Caminos de Francès, Portugais, del Norte, les chemins de la péninsule ibérique m’avaient ouvert » la voie » vers la Galice à trois reprises, je cherchais en 2018 un itinéraire en France. Sur le conseil de mon ami Daniel j’écartais encore de mon choix le chemin du Puy en Velay trop fréquenté et au budget hélas trop élevé pour finalement choisir la via Tolosana, c’est à dire la voie d’Arles car elle passe par Toulouse. Son originalité est de suivre intégralement le GR653 jusqu’à Punte La Reina en Espagne où arrive le Camino de Francès et ce en 5 ou 6 étapes depuis le Col du Somport.
Parmi tous les chemins qui traversent la péninsule ibérique vers Saint-Jacques de Compostelle, le Camino del Norte se démarque par sa tranquillité et sa relative difficulté. Après mes expériences sur le Camino de Francès et le Portugais, J’en garde surtout le souvenir d’un parcours splendide empreint d’une heureuse solitude.
Un camino sauvage entre montagne, campagne et océan.
Aussi appelé le Camino de la Costa, ce chemin qui suit en effet la côte nord de l’Espagne n’est pas le plus fréquenté par les pèlerins en marche vers Compostelle. Seulement 6 et 8 % d’entre eux l’empruntent depuis Irun à la frontière espagnole pour rejoindre la capitale de la Galice au Nord Ouest du pays. Après mes voyages en 2014 et 2015 sur les chemins Francès et Portugais, parcourus toujours d’une seule traite, un divorce, des épreuves sentimentales et familiales, me poussaient à repartir vers Compostelle, une longue marche qui se posait comme une thérapie évidente tant la rupture avec la quotidien m’est bénéfique. Lequel choisir ? Les chemins espagnols ne demandent aucune réservation des hébergements et le budget global de 20 à 30€ par jour me convenait d’avantage que les parcours en France pourtant magnifiques. Depuis longtemps je lorgnais avec intérêt, curiosité et une pointe d’angoisse le profil du Camino del Norte. Je relus quelques passages du controversé bouquin de Ruffin « Immortelle Randonnée ». J’effectuais des recherches sur les forums et demandais enfin l’avis de mes amis pèlerins. Résultat, si le Camino del Norte n’est pas l’Everest , ses 15.000 m de dénivelée positive, son isolement, les trop longues portions bitumées, le nombre réduit de ses hébergements avaient de quoi me faire réfléchir et douter. Cela dit, sur le papier ce parcours me séduisait irrésistiblement avec ses 815 km alternant des passages un peu montagneux, le chemin côtier et ses petits ports , des sentiers en pleine campagne et la traversée de villes passionnantes comme Bilbao, Santander ou Gijon. J’allais être comblé.
Franchir le fossé entre l’envie le doute
Prendre le bateau pour traverser les baies
D’une forme physique médiocre, des douleurs dorsales persistantes, des élections présidentielles imminentes, la culpabilisation de laisser seule ma vieille maman, bref je trouvais une foule de prétextes pour repousser deux fois la date de mon billet de train. « Basta, me suis-je dis. Ça sera pour le 15 mai ou ça ne sera pas ! ». L’idée de renoncer et rentrer au bout d’une semaine, un peu cassé moralement n’était cependant pas exclue. Alors trop vieux Kirsch , trop long le chemin, top dur le profil ?! Je doutais. Histoire de me rassurer je pensais alors à mon ami Daniel, 75 ans, toujours en marche sur les chemins. Puis je revoyais aussi Edward, mon copain de rando de Sport et Nature. Je l’avais revu avant de partir, là, cloué sur lit d’hôpital par la maladie. J’ignorais alors que je ne le reverrais pas vivant. Il faut parfois mesurer sa chance et arrêter de trop se regarder le nombril vautré sur son canapé. Quitte à avoir mal partout, autant que ce soit en marchant ! Rassuré par un scanner vertébral satisfaisant et dotée de la trousse à pharmacie du parfait hypocondriaque, je devais tailler la route.
D’autant que j’étais prêt depuis un moment ! Mon fidèle sac à dos Osprey m’attendait sagement dans ma chambre depuis un mois. Je le refaisais une à deux fois par semaine afin de trouver un poids optimum de 9 kg. Je recomposais à maintes reprises les trois pochettes de congélation qui constituent le trousseau du pèlerin ordinaire: une avec les affaires de nuit (T-shirt, caleçon, boules Quiès, écouteurs, lampe frontale,..), une autre de linge propre et enfin une avec kit de toilette (un savon de Marseille, des épingles à linge et la serviette).
Prêt pour un nouveau camino cette fois en solo (ma girl-friend marcheuse berlinoise voguant et roucoulant vers d’autres horizons). L’idée de cheminer seul ne m’a jamais effrayé. Bien au contraire, j’apprécie plutôt cette liberté totale et puis les chemins de Compostelle sont l’occasion de rencontrer beaucoup d’autres marcheurs venus du monde entier. J’allais vite découvrir que le Camino del Norte s’avère une exception.
L’albergue de pèlerin, un mélange savoureux de convivialité et promiscuité !
Lundi 15 mai. Train de banlieue, métro et gare Montparnasse, un pèlerin parigot ressemble à n’importe quel touriste à Paris ou vacancier en partance pour la montagne. Au bout de 6h de TGV, je débarquais à Irun pour rejoindre l’albergue municipale. La petite ville espagnole sortait de la siesta, les locataires d’un soir s’affairaient à leurs occupations : manger, se reposer, laver, soigner les bobos. Durant ces heures, j ‘avais eu le temps de parcourir virtuellement les 34 étapes élaborées dans le guide de poche Rother. Dès le lendemain matin, j’attaquerais la première plutôt motivé. Pour 8 euros la nuit l’hospitalero m’affecta un lit dans le dortoir. Je retrouvais l’ambiance un rien minimaliste des établissements bon marché du bas de l’échelle hôtelière espagnole. Il suffit juste d’imaginer deux étages d’appartements avec des dortoirs dans la chambre des gosses et des parents. L’incontournable micro-ondes, des accessoires de cuisine disparates, un serveur wifi au rayon d’action limité, une salle de douche refaite à l’économie. Et puis les prises multiples destinées à la charge des portables et tablettes du nouveau pèlerin connecté. J’y reviendrais. Des duvets sur les lits, du linge qui sèche sur les montants métalliques, des odeurs confuses de savon, de pommades, de bouffe, des discussions entre novices et vieux routards sous les néons de la salle commune. Une albergue quoi !
Et toujours le même casse-tête : le sac à dos ! Même après le Camino de Francès en 2014 (810 km depuis St Jean Pied de Port) , le Camino portugais en 2015 (700 km depuis Lisbonne) , rien n’y fait, je n’ arrive pas vraiment à respecter la règle : le poids du sac ne doit pas dépasser les 10% du poids du marcheur . Après ces deux expériences, j ai pourtant mis au rebus : gamelle, boussole, couverture de survie, un t-shirt, etc.. J’ai investi dans bâtons de marche en carbonne, j ‘ai même coupé toutes les sangles non utiles du sac Osprey . Car le plus dur reste à rogner sur la trousse de toilette, la pharmacie et les accessoires.
Avec au programme de 30 à 35 jours de marche , j’ai déjà mal avant de partir et pare davance à tous les bobos et autres déssèchements cutanés ! Ajoutons que tout bon pélerin-connecté a autant besoin de recharger ses batteries que celles de son smarphone et appareil photo. La normalisation 5V USB est ici providentielle, un seul chargeur suffit désormais. Je pars donc surchargé avec toutefois la certitude d’envoyer en poste restante de St Jacques un colis de surplus , comme à chaque fois. Le bureau de poste en regorge ! Pour ceux qui se lancerait dans l’ aventure, voici la composition du dit sac et de mon équipement .
Et un seul conseil : chaque kilo inutile est un kilo en trop.
Investissez européen dans du vrai matériel léger en oubliant notre cher Décathlon sur certains produits. Mes choix : Veste Arc Térix (US) , pantalon Vaude (D), duvet Cumulus (PL), Sac Osprey (US), Chaussures Meindl (D). La tente et le tapis de sol sont inutiles à moins que vous ne supportiez pas les dortoirs et les ronfleurs. Quant aux vêtements, on peut résumer la question : une tenue sèche, une tenue de rechange et une tenue sale.
Une sacoche fourre-tout pour la journée et pour le soir
C’est bien pratique d’avoir sous la main de quoi se payer un verre, une paire de lunettes ou le guide , la crédentiale (votre passeport pour les auberges) ou encore de la crème solaire . Chacun choisit et trimballe cette sacoche suivant son style : en bandouillère , dans le sac ou accrocher au sac. Beaucoup de randonneurs transforme leur sac à doc en sapin de Noël , les multiples étuis pendouillent de partout ! Mon conseil : ne laissez jamais votre portefeuille sans surveillance, même en prenant votre douche.
Depuis quelques années et notamment suite au succès du livre de Jean-Christophe Rufin « Immortelle randonnée », le Camino Del Norte connaît une fréquentation en hausse. Ce chemin attire en effet de nombreux pèlerin par son caractère sauvage et son relief . Je compte bien m’y attaquer mi avril 2017 après mes expériences sur le Caminos de Francès et le Camino portugais. Malgré cette fréquentation en hausse, la documentation en terme de guides, restait plutôt pauvre. Il y a bien le Guide Lepère, mais sa conception et la qualité de sa cartographie m’ont déçu. C’est avec beaucoup d’intérêt que j’ ai appris que l’éditeur allemand Rother lancerait fin mars un guide sur le Camino del Norte en plusieurs langues dont une version en français. J’ai eu la chance de m’en procurer déja un exemplaire pour préparer mon voyage et j ‘avoue que cet ouvrage m’ a plus que séduit . Et ce pour les raisons suivantes.
Ce guide de 215 pages est proposé au format 16,5 X 11, 5 cm , une taille idéale pour se loger dans un poche de pantalon de rando ou une sacoche d’appoint.Les couvertures sont plastifiées, un point important vu les conditions météos parfois humides. Prix : de 15 à 17 €. Disponible en librairies spécialisées, en ligne, sur le site de Rother
Une cartographie astucieuse et un concentré d’information
Rother a particulièrement travailler sur la cartographie des 34 étapes proposées pour relier Irun à Fisterra puis Muxia sur la côte (80 km après St Jacques. Chacune d’entre elles comporte un tracé au 1.100.000e , suffisant pour visualiser le parcours. Ces cartes mentionnent les points de vue remarquables, les sites historiques mais aussi toutes les facilités pour le pèlerin sous formes de pictogrammes avec légendes et abréviations : auberges, campings, pharmacies, cafés, transports..etc..
Entrer une légende
la partie vraiment novatrice concerne le profil des étapes. D’un seul coup d’oeil le marcheur visualise sur une échelle graduée en heures de marche et en kilomètres sa progression et les dénivelées du parcours, mais aussi la présence des facilités évoquées . Chaque villes ou villages comporte un numéro que l’on retrouve dans le texte courant. L’auteur guide le pélerin presque pas en pas en fonction des changements et repères de direction. Ce guidage est particulièrement utile dans la traversée des grandes villes, des passages où l’on se perd souvent quand le fléchage jaune ou les coquilles disparaissent soudainement !
Cette version a été réalisée à partir d’ infos très récentes récoltées lar l’auteur Cordula Rabes. C’est donc la garantie d’y trouver les adresses des derniers gîtes et auberges ouvertes sur le chemin. Chaque établissement comporte le prix de la nuité, le nombre de places ainsi que des infos générales (four à micro ondes, dates ..)
Des données historiques et géographiques passionnantes
Tout au long de sa progression, le marcheur trouve un condensé d’informations culturelles sur les lieux traversés maid aussi des références historiques . L’auteur y mentionne également les dates des principaux évènements notamment les fêtes et festivals . Ces textes sur fond jaunes donnet une meilleure lisibilité à l’ensemble.
Et pour les geeks, Rother offre les traces GPS (.gpx) de toutes les étapes !
Malgré le fléchage plutôt efficace sur les chemins vers Compotelle, beaucoup de randonneurs garde l’apppréhension de se perdent . C’est légitime même si ces petites errance permettent de favoriser les contacts avec la population. Toutefois j’ ai pu aussi constater que les explications de mes sympathiques interlocuteurs m’ont mené parfois sur des routes assez éloignées du chemin voire des routes vers Compostelle mais en voiture !
Le GPS fait désormais partie de la panoplie du randonneur pourquoi s’en priver . C ‘est pourquoi Rother propose à ses lecteurs de son guide papier de télécharger la trace du parcours au format classique .GPX sur son site . www.rother.de . Le login et le password sont mentionnés à la page 6 . L’utilisation de ces traces .gpx est simple . D’abord il faut charger sur son appareil le fond de carte au 1:25.000e (cartes SD ou couches avec l’application l’Iphigénie. Cette application IGN (France) comprend toutes les cartes de topographie IGN Espagne et ce gratuitement. Puis on charge les traces proposées par Rother. (par mail sur le smartphone avec Iphigénie) que l’on visualise simplement ou que l’on suit en temps réel en marchant .
Conclusion.
Voici un compagnon de voyage très bien pensé qui sera accessible facilement dans votre panoplie de parfait pèlerin. La cartographie très condensée et bien illustrée vous aidera à planifier vos étapes selon votre forme en trouvant les hébergements sur le parcours. Le texte et les picto de directions vous guidera efficacement tout au long des 836 km ce Camino del Norte qui emprunte le Primitivo. Pour les inquiets et les geeks , téléchargez et suivez la trace des 34 étapes sur votre GPS (type Garmin ou Smartphone)