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L’homme qui dessinait son chemin sur la Via de la Plata

Les Chemins de Compostelle sont chaque fois l’occasion de rencontrer des êtres particuliers, de ces hommes ou femmes qui marquent votre voyage par leur quête, leur attitude, leur sensibilité ou parfois une passion anachronique sur de tels itinéraires. Par le passé j’ai ainsi côtoyé des photographes lourdement chargés, des équipes de tournage et leur logistique importante, des animateurs sociaux accompagnant durant des mois des jeunes à la dérive, des familles chrétiennes et leur multitude d’enfants chantant et priant sur le chemin depuis dix ans, des pèlerins au look vintage tout droit sortis du Moyen-Age, des cyclistes brésiliens frustrés, s’étonnant ne rien avoir vu après avoir parcouru le Camino Francès en dix jours, Nicolas cet unijambiste faisant une sieste la nuque calée sur sa prothèse ou encore Jan le Hollandais de 90 ans nourri aux yaourts tirant sa cariole depuis des années sur des milliers de kilomètres entre Fatima, Santiago, Lourdes et Rome. Ces images reviennent souvent à ma mémoire et ravivent l’affection ou l’admiration que j’ai pu éprouver lors de ces rencontres durant mes multiples pérégrinations en France ou sur la péninsule ibérique.

Le dernier personnage en date s’appelle Pedro Cabral, je l’ai rencontré par hasard en mars 2022 ou par chance sur la Via de la Plata et sur le Camino Sanabrès , un camino où l’on compte les pèlerins sur les doigts des deux mains tant cet itinéraire est désert… de tout ! Imaginez 1000 km de Séville à Saint-Jacques, de l’Andalousie aride en passant par l’Extremadura tout aussi inhospitalière dont seuls les chênes liège et les oliviers viennent rompre la monotonie. C’est pourtant là que réside toute la fascination de ce chemin.

Début du voyage en traversant un parc naturel planté de chênes liège où s’ébattent les fameux cochons noirs
un carnet, des Rotring, une palette de couleurs.

Ce soir là, attablé dans le dortoir de la pension municipale de Zafra, l’homme en avait probablement fini avec sa lessive ou ses courses à la tienda du coin. Peut être avait il même renoncé à une sieste réparatrice avant le diner ? Non, Pedro peignait ! Je m’approchais et contemplais d’abord les lignes fines de son dessin. La plume du Rotring glissait sur le bloc de papier puis il ouvrit une minuscule boite de couleurs et l’aquarelle se mit à vivre par touches délicates . Je reconnus immédiatement le paysage que l’on avait traversé durant cette journée. Il l’avait d’abord photographié et maintenant il le projetait sur le papier, de tout son art.

L’univers des dortoirs du chemin
une albergue incroyable entièrement tapissée de coquilles

Pedro ne gardait apparemment que l’essentiel du décor, il jonglait avec la lumière et les perspectives des maisons, des routes se perdant à l’infini ou celles des villages ou avec la trame de la végétation basse des plaines infinies . La vision d’un peintre pèlerin suscite une curiosité générale et un question sans doute redondante : pourquoi s’alourdir d’un tel matériel et peindre, là, maintenant sans attendre son retour ? J’évitais de lui poser cette sempiternelle question et je laissais l’artiste discret et solitaire se dévoiler. Pedro est un architecte, 69 ans aujourd’hui , qui attendait impatiemment l’âge de la retraite pour se lancer dans un nouveau pèlerinage.

Arrivée dans Salamanca , comme une oasis de vie plantée dans l’Extremadura
Tous les chemins mènent …à Compostelle comme le Camino Sanabrés qui prolonge la Via de la Plata vers la Galice

Il attendra cependant deux ans de plus que le Covid passe et que l’Espagne réouvre ses frontières et ses albergues ! Les rencontres sont spontanées et authentiques sur ces sentiers. Très vite nous avons sympathisé avec d’autres marcheurs et formé un groupe WhatsApp. Nos trajets se sont séparés puis rejoints, je recroisais Pédro quelques fois à la terrasse d’un café débutant un croquis . En quittant la Via de la Plata pour prendre le camino Sanabrès, le peintre allongea les étapes. Il était attendu à Lisbonne mais ses dessins publiés sur Facebook m’ouvraient la voie. je déchiffrais ses nouvelles œuvres avec toujours le même intérêt . Alors que la plupart d’entre nous bombardions le paysage à coup de photos numériques, Pedro se focalisait sur une seule pour en faire un tableau quotidien. Chacune recevait alors sa signature et la petite coquille ainsi que le numéro du jour.

L’Arche romaine de Caparra. Ce jour là un taxi nous amena vers le seul hôtel du coin à plus de 10 km

Ce détail est important sur ce genre de parcours où l’on manque vite de repères au point d’en oublier jusqu’à la date de son départ de Séville ! Déjà vingt jours de marche, encore une semaine pour virer vers la Galice et encore une autre pour atteindre Compostelle . Je mis quarante quatre jours pour atteindre mon but. Entre temps Pédro avait quitté le camino plus tôt que prévu ayant attrapé le Covid dans une pension surchargée. Après un confinement forcé à Lisbonne il revint finir son chemin avec sa fille Matha quelques semaines plus tard. Je le contactais à mon retour en France et lui proposais de diffuser ces dessins. Il refusa gentiment m’expliquant préparer une exposition et ce livre.

Pedro Cabral, un artiste en balade

une aventure de 1000 km depuis Séville.

Voilà donc quelques extraits de son carnet de voyage sur la Via de la Plata. Chacune de ces illustrations m’est familière et me ramène avec délice sur ce long périple à travers l’Espagne. Alors j’ai voulu à mon tour partager avec vous ces émotions si joliment peintes par Pédro et vous inciter à tenter l’expérience de cette grande solitude où chaque ville traversée est comme une oasis de beauté, de culture, où chaque rencontre comme celle-ci donnera du sens à votre chemin.

Texte Richard Kirsch

Extraits du livre de Pedro CABRAL blog Bonecos de Bolso

« Via de la Plata & Camino Sanabrés «  . Disponible sur commande pmcabral@gmail.com

La Via de la Plata .. un poquito más …

Parmi les Chemins de Compostelle que j’ai eu la chance de parcourir depuis 2014 , la Via de la Plata suivie du Camino Sanabrès reste une expérience exceptionnelle. Un camino qui exige un peu plus de résistance, d’improvisation, de temps, d’équilibre face à la solitude, bref.. un poquito más .. comme disent nos voisins espagnols. Récit de cette belle balade de 44 jours sur près de 1000 km, une remontée du sud au nord de cette ancienne voie romaine, en traversant l’Andalousie, l’Extremadura, Castille y Léon puis la Galice.

Via de la Plata .. départ de nuit

Mon équipement pour ce 6e camino de Compostelle .

Nouveautés : Chaussures Hoka Speedgoat 4 GTX

pantalon pluie running

poids total : 8 kg

Bivouaquer sur les chemins de Compostelle, entre choix et improvisation.

Alors que ces célèbres chemins sont le plus souvent parsemés de nombreux hébergements pour tous les budgets, allant de la simple auberge à l’hôtel confortable en passant par les campings , certains pèlerins choisissent de passer la nuit à la belle étoile ou planter leur tente en pleine nature. Afin de répondre à la multitude de questions que se posent les néophytes, j’aurais pu écrire un article technique. Mais entre temps, je suis tombé par hasard sur le post FaceBook de Nicolas de Rauglaudre sur ce thème. Flash back . J’ai rencontré ce garçon sur le Voie d’Arles en 2017 , quelque part en Espagne, de l’autre côté du col du Somport.

Il poussait sur des béquilles et comme moi rejoignait un gite improbable perdu dans un champs de ruines . Je l’y croisais à nouveau le soir et par la porte entre- ouverte, je vis une prothèse posée sur le sol, celle d’un unijambiste marcheur au long court tenace et patient, au mental inébranlable. Depuis cette rencontre Nicolas n’a cessé de parcourir d’autres chemins, contraint parfois de recourir au bivouac . Il nous livre ici de précieux conseils basés sur ces expériences, puis de savoureuses anecdotes histoire de convaincre les plus sceptiques que ces nuits au grand air restent des moments de vie intense !

Lors des marches sur les différents Caminos de Compostelle (soit 4200 km sur plus de 300 jours), j’ai dû dormir une vingtaine de fois dehors (étapes trop longues pour un handicapé et plaisir de dormir à la belle étoile). J’ai bivouaqué dans des forêts, dans des vignes, sous des oliviers, contre une meule de foin, sur une colline dans une prairie, dans un bosquet de bambous (extra), près d’une église (catastrophique), dans des parcs et même dans une caravane abandonnée. Cela vaut bien quelques idées (ou conseils) pour l’une ou l’un d’entre vous.

1. De préférence, NE PAS BIVOUAQUER PRÈS D’UNE HABITATION OU D’UN VILLAGE.
– Personne n’est à l’abri d’une mauvaise surprise. Pour les dames, veiller à ne pas être suivie.
– Il y a des chiens qui aboient et parfois rôdent.
– Le bruit et les lumières des voitures, voire des tracteurs qui rentrent, sont agaçants.
– Être prudent avec sa torche et s’installer quand la nuit tombe (pas trop tôt pour ne pas être repéré).
Bien sûr, on peut toujours demander à quelqu’un un lieu où dormir : il est préférable que ce soit quelqu’un de sûr. Je n’ai jamais eu de problèmes.


2. Corollaire : dormir à la belle étoile permet :
– de goûter la solitude et les merveilles de la nature.
– de s’émerveiller des levers du Soleil et dans la nuit, de contempler les étoiles et de sentir la Terre tourner sur elle-même (Oui, parce que ce n’est pas le Soleil qui tourne autour de la Terre).
– de profiter des premiers instants de marche après le lever du Soleil qui sont souvent les plus extraordinaires.
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3. Si dans la nuit, vous voyez une nymphe ou une ondine (pour les messieurs) ou un faune (pour les dames), pas de souci : vous êtes en train de dormir.
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4. ÉVITER DE DORMIR PRÈS D’UN POINT D’EAU
– Moustiques et autres petites bébètes inévitables, sans compter le concert des grenouilles.


5. MON PLUS GROS PROBLÈME et peut-être le vôtre : le FROID.
– Je ne suis jamais parvenu à vaincre ce problème. De plus, le moignon, mal vascularisé, est souvent glacial au lever.
– Démonter sa tente ou ranger ses affaires quand les mains sont gelées, ce n’est pas évident… même si la marche qui suivra réchauffe l’organisme.
– Remarque : ce n’est pas spécifique au bivouac. À Salamanca, j’étais gelé et j’ai dû acheter une doudoune. —–
6. Autre souci, l’HUMIDITÉ ou LA PLUIE (notamment en France et en Galice).
– Regarder la météo si possible avant de bivouaquer. Et s’il n’y a pas d’autres solutions :
→ monter sa tente avant la pluie.
→ S’il n’y a pas de tente, laisser tomber s’il va pleuvoir. Mieux vaut alors aller jusqu’au prochain village, s’abriter (porche d’une église ou d’une mairie) et souffrir jusqu’au lendemain…
Plusieurs fois, je me suis fait avoir par l’humidité, notamment en Galice et en Gascogne. Jamais en Andalousie. Pour sécher, c’est compliqué. En Espagne, heureusement, le coleil revient assez vite. Toutefois, la dernière fois que je suis arrivé à Santiago, mes vêtements étaient moites et n’ont séché qu’au bout de 3 jours, L’hébergement n’avait pas de chauffage…


6. MATÉRIEL
– En France, une tente. En Espagne, un sursac. J’ai rencontré une jeune femme qui dormait dans un hamac. Je n’ai jamais essayé.
– Prévoir un bon matelas gonflable et un sac de toile dans lequel on peut mettre ses vêtements pour l’oreiller.
Moi, comme oreiller, je me sers de ma prothèse que je place sous le sac.
– Bien sûr, un sac de couchage qui garde la chaleur : malheureusement, je n’en ai pas et ça coûte cher !
– NE PAS OUBLIER DE QUOI BOIRE et éventuellement de quoi manger.

7. LES ANIMAUX.
– Les gros : à titre personnel, cavalcades de chevreuils (c‘est chouette), renards, écureuils, lapins, et même une loutre une fois. Pas de sangliers. Des oiseaux (vautours, coucous, pies, outardes, hérons, cigognes…). Petits bruits très sympas la nuit : la nature est habitée. Un vrai plaisir.

– Les animaux domestiques : mieux vaut les éviter. Ai dormi une fois près d’un troupeau de moutons (Quercy). Clochettes toutes la nuit, et possibilité d’un patou (qui n’est heureusement pas venu) ! Pas près d’un âne non plus : alors là, c’est le réveil en fanfare assuré. Quant aux vaches, le danger est celui des mouches.

– Les petits : faire gaffe aux insectes. Je n’ai jamais eu de souci. Il faut toutefois veiller aux fourmis et surtout aux tiques dans les grandes herbes. Quant aux serpents et aux scorpions, ils ont plus peur que nous.
– Le CAUCHEMAR : les chiens sauvages, abandonnés et ceux qui aboient toute la nuit.


DE BONS SOUVENIRS ..DU NIRVANA AU CAUCHEMAR !
– Des chevreuils et peut-être même des cerfs ont tourné une bonne demi heure autour de moi, dans une forêt du Quercy. Les cris des chevreuils sont comme des aboiements tristes. Cela m’a impressionné longuement.
– Une fois, je m’étais installé dans un bois (en Castille). Un tracteur est passé plus bas. L’agriculteur est descendu et un autre l’a rejoint. Ils ont regardé un long moment dans ma direction. Ils m’avaient vu. J’ai pris mes affaires et ai été dormir 5 km plus loin.
– Une autre fois, alors que je dormais dans une prairie, le propriétaire du terrain m’a vu, il est venu m’apporter des sandwichs, des boissons et des gâteaux. Sympa, non ?
– Sur le Chemin Piémontais, en me réveillant un matin, tout était gelé. Mains glacées, le démontage de la tente a été très long et compliqué, En marchant quelques centaines de mètres, je me suis arrêté près d’un âne, je l’ai caressé et j’ai réchauffé les mains contre sa toison… tout en lui faisant écouter la Septième Symphonie de Beethoven.
– Après Salamanque, j’ai dormi dans un champ. Malheureusement, il y avait un chemin pas loin que je n’avais pas vu. Dans la nuit, une voiture est passée, a fixé ses feux dans ma direction et est resté un long moment ainsi. Je me suis dressé : la voiture est alors partie.
– J’ai dormi sous des oliviers en Andalousie. Nuit extraordinaire sous les étoiles, température agréable. Pas d’insectes. Le lendemain matin, j’avais des petits boutons sur le visage : j’ai songé à une plante allergène. Mais plus tard, je me suis demandé avec quels produits chimiques on arrosait les oliviers !


– Après Pampelune (Pamplona), j’ai dormi sur une pelouse près d’une église. Pas de bol : grosse lumière dans la patate, puis cloches tous les quarts d’heure et pour arroser le tout : pluie dans la nuit. J’ai dû repartir avant l’aube.
– En Gascogne ; J’ai monté une fois ma tente sous un orage ! Il est arrivé plus vite que prévu. Pas marrant pour ensuite entrer tout trempé dans la tente. Quant au lendemain, j’ai dû transporter la tente toute humide sous une météo maussade.
– Dans le Languedoc, j’ai une fois installé ma tente sous des éoliennes. Mauvaise idée : ça fait un de ces bruits !
– J’ai dormi une fois sur une plage (Hendaye) : tranquille jusque vers minuit où une bande de jeunes est arrivé. L’un d’entre eux a fait pipi à une vingtaine de mètres de moi… Mais on ne m’a pas vu.
– Dans un village, en Castille, nous étions deux. On nous a indiqué un joli parc. Malheureusement, un chien a aboyé toute la nuit…
– Sous le Pont du Diable, avant Saint-Guilhem-le-Désert, il était interdit de camper. Site extraordinaire, mais perturbé par l’idée que la Maréchaussée débarque en pleine nuit pour me virer.
BREF MIEUX VAUT DORMIR LOIN DES HABITATIONS : des bois, des coins sauvages, dans le silence et la solitude. C.Q.F.D.



BON, il ne faut pas s’arrêter sur ces mauvaises anecdotes. En réalité, dormir dehors est une expérience inoubliable, même avec une jambe amputée. À titre personnel, je m’endors très facilement, mais souvent je m’éveille dans la nuit : c’est le moment de méditer, de contempler la nuit et ses significations, de profiter de sa réserve de psaumes et de prières. Quant au matin, c’est souvent juste avant l’aurore que je me réveille.

Texte et photos Nicolas de Rauglautre

www.nicolasderauglaudre.net

Voie d’Arles, 955 km de Roman (et) d’aventure vers Compostelle

Pérégrination  au long cours sur un itinéraire jacquaire millénaire ponctué de bastides et d’églises, des colosses plantés dans une nature généreuse ondulée à souhait. Retour sur 36 jours de marche d’Arles à Punte La Reina en Espagne .

Pèlerin multi récidiviste à la pause qui prend la pose.

Pèlerin un jour, pèlerin toujours dit-on. Sans doute car depuis 2014 en bon récidiviste je reviens sur les Chemins de Compostelle  braver entre 700 à 1000 km d’un seul jet,  m’assurer  que la forme du senior est encore bonne.  C’est aussi le moyen de rompre  avec le quotidien durant un mois de vie nomade  ultra light ou l’essentiel se résume à marcher, se soigner et se nourrir en écartant le superflu.  Caminos de Francès, Portugais, del Norte, les chemins de la péninsule ibérique m’avaient ouvert  » la voie  » vers la Galice à trois reprises, je cherchais en 2018 un itinéraire en France. Sur le conseil de mon ami Daniel j’écartais encore de mon choix le chemin du Puy en Velay trop fréquenté et au budget hélas trop élevé pour finalement choisir la via Tolosana, c’est à dire la voie d’Arles car elle passe par Toulouse. Son originalité est de suivre intégralement le GR653 jusqu’à Punte La Reina en Espagne où arrive le Camino de Francès et ce en 5 ou 6 étapes depuis le Col du Somport.

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Fosses (95) l’hiver ? A l’aise glaise !

no comment !

Anita 1ere et ses demoiselles d’honneur de Sport et Nature présentent la nouvelle collection de bonnets.

N’essayez pas de comprendre pourquoi les parigots randonnent en été sous le cagnard ou en hiver sous la flotte, et ce dans un univers limité aux 5 zones du pass Navigo SNCF ! Moi, j’ai renoncé. Depuis déjà quelques semaines, les crues ont transformé le bassin parisien en une éponge mal essorée. Les randonneurs ne sont pas loin de troquer les bâtons contre des pagaies !  Toutes notions de vitesse, de moyenne sont à oublier . Les sentiers défoncés par les ornières des engins forestiers ou agricoles débordent par endroit et l’eau ruisselle dans la moindre côte entre les cailloux.  L’adhérence relève plus du patinage artistique que de la marche. Ce dimanche là seule une poignée de stakhanovistes pouvaient se rendre dans l’Oise alors que les conditions météo ne s’annonçaient guère meilleures dans cette région. A la sortie de la gare de Fosses (95), à peine arrivé dans la première plaine, le vent du Nord  glacial me cueillit à froid. Tympan gelé, douleur aiguë , oreille cassante comme du verre, j’enfonçais d’urgence le bonnet, je relevais capuches de la doudoune et veste Arc Térix et  le tour du coup en polaire jusqu’aux yeux. Le menu local s’annonçait 100% hivernal et le plat du jour était servi dès 9h30. Chantal, notre guide du jour, piqua plein ouest  vers Luzarches pour débuter une boucle de 25 km à cheval sur l’Oise et le Val d’Oise. (la boucle ..à cheval, pas nous ! ). Nelly la stagiaire-guide lui emboitait le pas.

Pique-nique express au lavoir.

Val d’Oise ou Oise, comme tu veux tu choises

Arrivée héroïque du groupe au calvaire , 200 m , sans oxygène.

Afin de positiver, Chantal évoqua la chance de pouvoir tester l’étanchéité du matériel et nous gratifia dans le RER D d’une touche culturelle relative au passé de Fosses : une ville de potiers, des artisans qui creusaient … des fosses pour en extraire l’argile. De ce côté là, tout le monde allaient être gâté. Le matériau  gluant à souhait nous colla gravement les baskettes durant des lieues. Par chance, le ciel ne nous  tomba pas sur la tête malgré la menace de quelques giboulées neigeuses . Après une douzaine de kilomètres, on arriva comme prévu (glaiseux mais heureux) au lavoir qui nous servirait d’abri pour le pique-nique. La fatigue et le froid tiraient sur les organismes, la reine Anita 1 ère victime d’un coup d’hypotension fut  remise sur pied à coup de dattes et boissons chaudes. Béatrice arrosa le groupe au rhum arrangé, Vincent, militant engagé et rebelle réussit à nous épargner durant douze secondes son flux verbal politico-social passionné, sur Aubenas-centre-du-monde , le tout sur fond de concubinage à géométrie

variable avec une mystérieuse  Anne-Marie.  Bravo ! Le vent polaire tourbillonnant en fait sous le lavoir , je pris même mon dessert avec les gants, le déjeuner ne dura pas plus de 35 minutes, il fallut décampé avant la congélation. On n’y croyait pas mais un rayon de soleil miraculeux perça soudain les nuages en éclairant le paysage d’une lumière quasi divine. Un petit bonheur furtif mais sublime. Puis une moitié du groupe s’enfonça dans les bois pour aller découvrir  la

un parcours de 25 km très exposé.

curiosité locale, un vrai menhir en vraie pierre même si Eric le qualifia avec un certain mépris de « mur d »escalade pour nain » , une réflexion qui irrita terriblement Chantal , qui jura que cette rando serait la dernière qu’elle organiserait  etc..Personne ne l’a crue et les touristes rejoignirent l’autre moitié du groupe qui bronzait sur le sentier de retour vers Fosses. Cet itinéraire intéressant, où les champs de betteraves fourragères alternent avec les bosquets boisés et quelques châteaux , mérite d’être refait au printemps dans les conditions disons.. plus clémentes . Allez qu’importe, l’important était de sortir ce jour-là de la capitale plongée dans la grisaille. Alors comme le répète Anita, prof d’anglais en banlieue chic : « oublie l’hiver, va marcher  toi aussi et  kiffe ta life ! »

 

 

 

Téléchargez la trace GPS de cette randonnée ICI

Terrain de jeux entre culture et cultures.

Nelly et Chantal en pleine réflexion d’orientation

What ? Du soleil ? !!

Du haut de se menhir, 400.000 ans d’histoire me submergent.

Jan, 80 ans, un extra-terrestre vers Compostelle

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Une carriole en stratifié de polyester pour tout bagage.

Au début, j’ai cru à une hallucination lorsque j’ai vu arriver ce bonhomme maigrichon en ville, dans une albergue à Palace del Rei sur le Camino de Francès l’an dernier. Il tirait une remorque blanche derrière lui, avec un drapeau hollandais flottant dans l’air tiède . Je me suis approché pour voir à quoi ressemblait cet étrange équipage.  Il m’a fallut juste lire les inscriptions sur le capot pour commencer à comprendre à quel genre de personnage j’avais à faire.  L’air éreinté mais souriant, le type, véritable bête de somme sorti de nulle part, s’est débarrassé  lentement du harnais  puis il prit un des deux bidons accrochés sur la remorque pour se ré-hydrater. Il était grand, très mince, des cheveux gris tombaient de chaque côté de son beau visage . Puis il a maœuvré pour garer sa carriole dans le garage à vélo. Il ne cessait de sourire, visiblement comptant d’être arrivé.  Jan vient de Hollande mais Compostelle ne signe pas la fin de son voyage, son pèlerinage. Avant d’arriver sur le Camino, il est d’abord passé par Lourdes . Après Santiago, il se rendra à Fatima puis repartira encore plus loin : à Rome ! J’allais diner avec d’autres pèlerins et je le recroisais au centre ville .

The walking Dutschman, 80 ans, des Pays-Bas jusqu’à Compostelle

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Départ au petit jour pour une journée d’effort vers St Jacques de Compostelle

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Un ex-marathonien nomade animé par la foi et nourri aux yaourts

Lui aussi cherchait un bon menu à 10€ . De retour à l’albergue, il était là et  bricolait  je ne sais quoi dans sa carriole. Toute sa vie de nomade organisée était dans ce coffre fabriqué en polyester. Il en tira ses affaires pour la nuit et disparu dans un dortoir. Je le retrouvais le lendemain matin au départ , puis le perdis de nouveau de vue . Un soleil pâle se levait et je pris la route vers Arzua. A la sortie d’un bois je revis Jan. Il cheminait sur l’asphalte le long du rail de sécurité, doublé par les voitures . La route montait et je mesurais combien il souffrait. il s’arrêtait régulièrement pour reprendre des forces et son souffle . Mais derrière cette souffrance, je voyais toujours le même sourire sur son visage. Avec ce type de carriole, le bonhomme ne pouvait suivre le Camino par tous les sentiers.

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Pèlerinage initiatique vers Compostelle, entre bonheur et douleur

Kirschos Goes to Compostelle saison 1

9 avril – 14 mai 2014. De Saint-Jean-Pied -de -Port à St Jacques de Compostelle , sur le Camino de Francès – 800 km

Lors de multiples sorties effectuées dans divers clubs de rando, en Indre et Loire ou à Paris, j’avais eu l’occasion de débattre avec mes collègues de l’intérêt ou non de parcourir les chemins de Compostelle. Ces itinéraires mythiques ne présentent plus aucun secret pour le randonneur aguerri tant la littérature, les forums, les derniers films et les livres en font écho. Les partisans invoqueront les bienfaits d’un voyage intérieur en rupture totale avec le quotidien ou encore le potentiel culturel et humain du parcours. Leurs adversaires les plus virulents évoqueront la douleur, de l’ennui de parcourir souvent des kilomètres d’asphalte sous le cagnard ou la pluie, la surpopulation de pèlerins , le business, les distributeurs de canettes en rase campagne ou que sais-je encore, le risque croissant de rapporter des punaises de lit !

Après une première analyse du projet, j’avoue que mon cœur penchait plutôt du côté des sceptiques ou des adversaires. Tout aurait pu en rester là si un jour Françoise, encore mon épouse à l’époque, ne n’avait pas offert le bouquin de Jean-Christophe Rufin « Immortelle randonnée, Compostelle malgré moi »

L’Académicien, auteur entre autres du fameux livre « Rouge Brésil », y raconte son périple improvisé sur le Camino Del Norte, le chemin de Compostelle qui suit la côte nord espagnole depuis Irun, alors qu’il avait planifier à l’origine de traverser les Pyrénées d’Ouest en Est. La météo en décida autrement. Ce récit m’a tout de suite emballé et donné l’envie immédiate de tenter cette aventure en solo. Je choisissais de partir seul pour des raisons d’ordre privé, je ne voyais dans mon entourage personne suffisamment complice, disponible et en forme à qui proposer une telle marche.

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